Ci-dessous le communiqué de Madres y Familiares de Uruguayos detenidos desaparecidos (Mères et Familles d’Uruguayens Détenus Disparus) rendu public dans une conférence de presse le 17 décembre 2025.
L’association ¿Dónde Están? réaffirme sa totale opposition à ces projets infâmes et soutient toutes les organisations qui se mobilisent pour qu’ils ne soient pas approuvés.
Montevideo, 17 décembre 2025
Nous tenons tout d’abord à remercier toutes les personnes qui nous accompagnent une nouvelle fois. Nous avons convoqué cette conférence urgente, alarmés par les événements de lundi dernier : alors que l’Assemblée générale commémorait les 40 ans du retour à la démocratie et réaffirmait son engagement en faveur de la mémoire et du « Plus jamais ça », les sénateurs Bordaberry et Goñi ont présenté des projets de loi révisionnistes qui érodent les consensus établis en matière de droits humains.
Loin d’honorer la démocratie qu’ils prétendent commémorer, ces projets la fragilisent en reprenant de vieux discours, en réinstallant une logique de fermeture du passé et en portant atteinte aux progrès réalisés en matière de justice.
Le projet de Pedro Bordaberry porte atteinte à tout engagement institutionnel et à la reconnaissance du terrorisme d’État en Uruguay. Il ignore la voie tracée par les lois et résolutions antérieures en niant l’existence de crimes contre l’humanité avant 1973, ainsi que leur caractère systématique et la responsabilité de l’État dans ces crimes.
Aucun passage de ce projet ni de l’exposé des motifs ne reconnaît la responsabilité de l’État, et le terme « disparition forcée », crime reconnu par le Comité international contre les disparitions forcées des Nations unies et par la Cour interaméricaine des droits de l’homme de l’Organisation des États américains, est délibérément omis.
Nous devons être très clairs à ce sujet : nos proches ne sont pas des personnes « dont on ignore le sort » ; ils sont victimes de disparitions forcées pour lesquelles l’État est responsable et/ou a donné son accord, comme le reconnaissent les lois en vigueur. Ils ont été enlevés, torturés, assassinés et disparus à cause du terrorisme d’État. Nous n’acceptons et n’accepterons aucune tentative de nier cette vérité. Ils ont été disparus par l’État, et c’est à celui-ci qu’il appartient d’assumer ses responsabilités et d’agir en conséquence.
Nous ne voulons pas de nouvelles Commissions pour la Paix qui réitèrent des versions déjà vérifiées comme étant fausses, ni de commissions qui délimitent les responsabilités judiciaires. Nous exigeons le renforcement des équipes existantes, le respect de la loi par l’ensemble de l’État, afin de progresser dans les domaines de la mémoire, de la vérité et de la justice, ainsi que le respect du travail des équipes d’enquête de l’Institution Nationale des Droits Humains et du Groupe d’enquête en anthropologie médico-légale. Nous demandons une fois de plus que l’ordre soit donné aux forces armées de livrer toutes les informations dont nous savons qu’elles disposent.
Nous avons maintes fois expliqué la gravité de la tentative d’autoriser ou d’étendre l’assignation à résidence des personnes condamnées pour crimes contre l’humanité, objectif partagé par le projet de loi du sénateur Goñi. Nous le répétons : les crimes contre l’humanité ne sont pas des faits isolés ; ce sont des crimes d’une extrême gravité commis de manière systématique par l’appareil d’État ou avec son soutien. Leur caractère exceptionnel les exclut de toute assimilation à des crimes de droit commun et exige une réponse pénale ferme, efficace et proportionnée de la part de l’État.
Le droit international est catégorique : l’État a le devoir d’enquêter, de juger et de sanctionner les violations des droits humains, en évitant toute mesure qui réduirait l’effet de la condamnation ou conduirait à des formes d’impunité déguisées. L’assignation à résidence est donc contraire aux obligations de l’État, notamment à celles prévues par la Convention américaine relative aux droits humains, la Convention contre la torture et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.
Rappelons qu’il existe déjà une procédure légale permettant d’octroyer l’assignation à résidence pour raisons de santé. Cette procédure établit qu’en cas de maladie incompatible avec le séjour en prison, le juge de l’application des peines peut, sur la base de certificats médicaux délivrés par le pouvoir judiciaire, ordonner l’exécution de la peine sous cette forme. À ce jour, environ la moitié des répresseurs condamnés bénéficient déjà de cette mesure, et ceux qui restent en prison le font dans des conditions privilégiées. Les propositions en question ne répondent donc pas à un besoin juridique, mais constituent une amnistie délibérée, orientée -avec nom et prénom, visant clairement à bénéficier à un groupe très spécifique de personnes ayant fait partie de l’appareil répressif du terrorisme d’État et condamnées pour des crimes très graves.
Ceux qui sont aujourd’hui poursuivis et jugés par la justice ont bénéficié de toutes les garanties du processus judiciaire, dont les victimes ont été privées. Les victimes, leurs familles et la société tout entière ont droit à la justice, à une sanction proportionnelle à l’ampleur du préjudice subi et à des garanties de non-répétition. L’assouplissement de l’exécution des peines engendre une revictimisation et porte atteinte à la confiance dans le système judiciaire.
Pour toutes ces raisons, nous réaffirmons très clairement que cette initiative vise l’impunité et non la justice. Il ne s’agit pas d’une loi générale ou abstraite. C’est une loi sur mesure qui vise des destinataires précis et constitue un recul inadmissible en matière de mémoire, de vérité et de justice.
On affirme que l’objectif est de clore les dossiers en suspens avec dignité, équilibre et sérénité institutionnelle. À cela, nous répondons : qui mieux que les mères ont su faire preuve de dignité ? Quelle dignité chez ceux qui attendent et frappent aux portes depuis plus de 50 ans à la recherche de réponses ! Quelle sérénité chez ceux qui ont été confrontés au mensonge une et mille fois !
Le sénateur Bordaberry tente d’imposer un discours de clôture du passé en promouvant l’idée d’une « réconciliation » détachée de la vérité et de la justice. Dans ce cadre, des logiques d’amnistie dissimulées sont réinstallées, qui relativisent le rôle central des victimes. Établir une réconciliation implique d’accepter l’existence de deux camps, ce qui est loin de la vérité. Il n’y a pas eu de guerre ici, mais l’usurpation de l’État par une dictature qui a déployé l’autoritarisme, la cruauté, la persécution et la mort pour imposer la terreur.
Nos proches sont toujours séquestrés sous le joug du terrorisme d’État. Les auteurs de ces crimes continuent jour après jour de couvrir les disparitions forcées. C’est pourquoi nous affirmons qu’il n’y a pas une pleine démocratie tant que ce crime continuera d’être perpétré. Seules la justice et la vérité, qui se révèlent à travers les plaintes judiciaires et les corps retrouvés dans des terrains militaires, nous indiquent la voie à suivre.
C’est la raison pour laquelle nous appelons le peuple uruguayen et toutes les organisations sociales à rester vigilants, à défendre activement la mémoire et à rejeter toute initiative qui, sous couvert de conciliation, tenterait de clore le passé, de modeler le présent et d’écrire un avenir dans l’impunité.
Nous méritons et avons besoin d’une démocratie sans disparus, avec mémoire, vérité et justice.
C’est seulement ainsi que nous pourrons construire un « Plus jamais ça ».
Madres y Familiares de Uruguayos detenidos desaparecidos.
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Montevideo, 17 de diciembre de 2025.
Queremos iniciar agradeciendo a todos y todas quienes nos acompañan una vez más. Convocamos esta conferencia de carácter urgente alertados por lo acontecido el pasado lunes: mientras la Asamblea General conmemoraba los 40 años del retorno a la democracia y reafirmaba su compromiso con la memoria y el Nunca Más, los senadores Bordaberry y Goñi presentaron, en contraparte, proyectos de ley revisionistas que erosionan los consensos construidos en materia de derechos humanos.
Lejos de honrar la democracia que dicen conmemorar, estos proyectos la debilitan, reeditando viejos discursos, reinstalando lógicas de clausura del pasado y atentando contra los avances logrados respecto a la Justicia.
El proyecto presentado por Pedro Bordaberry atenta contra todo compromiso institucional y el reconocimiento del terrorismo de Estado en Uruguay. Desconoce el camino trazado por leyes y resoluciones anteriores al ignorar la existencia de delitos de lesa humanidad con anterioridad a 1973, negando también su carácter sistemático y la responsabilidad estatal sobre estos crímenes.
En ningún pasaje de este proyecto ni en la exposición de motivos se reconoce la responsabilidad del Estado y se elige omitir el término desaparición forzada, delito reconocido por el Comité Internacional contra la Desaparición forzada de Naciones Unidas y la Corte Interamericana de Derechos Humanos de la Organización de Estados Americanos.
En esto debemos ser muy claros: nuestros familiares no son personas “cuyo paradero se desconoce”; son víctimas de desaparición forzada por responsabilidad y/o aquiescencia del Estado, tal como lo reconocen las leyes vigentes. Fueron secuestrados, torturados, asesinados y desaparecidos por el terrorismo de Estado. No admitimos ni admitiremos ningún intento de negar esta verdad. Fueron desaparecidos por el Estado y es éste quien debe responsabilizarse y actuar en consecuencia.
No queremos nuevas Comisiones para la Paz que reediten versiones ya comprobadas como falsas, ni Comisiones que deslinden responsabilidades judiciales. Exigimos el fortalecimiento de los equipos existentes, el cumplimiento de la ley mediante el trabajo de todo el Estado para avanzar en Memoria, Verdad y Justicia, el respeto al trabajo de los equipos de investigación de la Institución Nacional de Derechos Humanos y del Grupo de Investigación en Antropología Forense. Demandamos, una vez más, que se dé la orden a las Fuerzas Armadas para que entreguen toda la información que sabemos que poseen.
Hemos explicado hasta el hartazgo la gravedad en el intento de habilitar o ampliar la prisión domiciliaria para personas condenadas por delitos de lesa humanidad, objeto compartido por el proyecto del senador Goñi. Reiteramos: los delitos de lesa humanidad no constituyen hechos aislados, son crímenes de extrema gravedad cometidos de forma sistemática desde el aparato del Estado o con su amparo. Su carácter excepcional los ubica fuera de cualquier lógica de equiparación con delitos comunes y exige, por parte del Estado, una respuesta penal firme, efectiva y proporcional.
El derecho internacional es contundente al establecer que el Estado tiene el deber de investigar, juzgar y sancionar las violaciones a los derechos humanos, evitando toda medida que, en los hechos, reduzca el efecto de la condena o derive en formas encubiertas de impunidad. La prisión domiciliaria es entonces, contraria a las obligaciones asumidas por el Estado, entre ellas la Convención Americana sobre Derechos Humanos, la Convención contra la Tortura y el Estatuto de Roma de la Corte Penal Internacional.
Recordemos que ya existe un procedimiento legal para la concesión de prisión domiciliaria por motivos de salud, el cual establece que, ante una enfermedad incompatible con la permanencia en un establecimiento penitenciario, el juez de ejecución, con base en certificados médicos del Poder Judicial, puede disponer el cumplimiento de la pena bajo dicha modalidad. A la fecha, aproximadamente la mitad de los represores condenados ya se encuentran amparados por esta medida y quienes permanecen en prisión lo hacen, además, en condiciones de privilegio, por lo que las propuestas en cuestión no responden a una necesidad jurídica, sino que configuran una amnistía deliberada, orientada —con nombre y apellido— a beneficiar a un grupo muy específico de personas que integraron el aparato represivo del terrorismo de Estado y fueron condenadas por crímenes gravísimos.
Quienes hoy se encuentran procesados y formalizados por la justicia, conocieron todas las garantías del proceso judicial; garantías que las víctimas no tuvieron. Las víctimas, sus familiares y la sociedad toda, tenemos derecho a la justicia, a una sanción acorde a la magnitud del daño sufrido y a las garantías de no repetición. La flexibilización del cumplimiento de la pena genera revictimización y lastima la confianza en el sistema judicial.
Por todo ello, reafirmamos con absoluta claridad que esta iniciativa no busca justicia: busca impunidad. No es una ley general ni abstracta. Es una ley hecha a medida, con destinatarios concretos, y constituye un retroceso inadmisible en materia de Memoria, Verdad y Justicia.
Se afirma que el objetivo es cerrar capítulos pendientes con dignidad, equilibrio y serenidad institucional. Y a esto cabe responder: quiénes más que las madres han sabido ser dignas; cuánta dignidad hay en quienes esperamos y golpeamos puertas buscando respuestas desde hace más de 50 años. Cuánta serenidad en quienes hemos enfrentado la mentira una y mil veces.
El senador Bordaberry pretende instalar una narrativa de clausura del pasado, promoviendo la idea de “reconciliación” desligada de la verdad y la justicia. En ese marco, se reinstalan lógicas encubiertas de amnistía que relativizan la centralidad de las víctimas. Establecer una reconciliación implica aceptar la existencia de dos bandos y eso está lejos de la verdad. Aquí no hubo una guerra, sino la usurpación del Estado por una dictadura que desplegó autoritarismo, crueldad, persecución y muerte para imponer el terror.
Nuestros familiares siguen secuestrados bajo las garras del terrorismo de Estado. Sus autores continúan, día tras día, encubriendo el crimen de desaparición forzada. Por ello, sostenemos que no hay democracia plena mientras este delito se siga perpetrando. Sólo la justicia y la verdad de los hechos -que se abren paso en las denuncias judiciales y en los cuerpos encontrados en predios militares- nos marcan el camino a recorrer.
Por todo lo expuesto, convocamos al pueblo uruguayo y a todas las organizaciones sociales a mantenerse en alerta, a defender activamente la Memoria y a rechazar toda iniciativa que, bajo un lenguaje conciliador, intente clausurar el pasado, moldear el presente y escribir un futuro en impunidad.
Merecemos y necesitamos una democracia sin desaparecidos, con Memoria, Verdad y Justicia.
Solo así podremos construir un Nunca Más.
Madres y Familiares de Uruguayos Detenidos Desaparecidos